Synode : Amazonie et Bassin du Congo, même combat, selon le Cardinal Ambongo

L’archevêque de Kinshasa en République démocratique du Congo, est l’un des pères synodaux de l’Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l’Amazonie. Ses impressions, les problématiques similaires pour la forêt du Bassin du Congo, c’est de tout cela qu’il a échangé avec nous.

Jean-Pierre Bodjoko, SJ – Cité du Vatican

L’Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l’Amazonie, qui se tient au Vatican du 6 au 27 octobre 2019 tend vers sa fin. C’est sans doute déjà le moment de recueillir des avis et considérations.

Un appel à la responsabilité

Pour le Cardinal Ambongo, le Synode est entré dans la phase qui consiste essentiellement à l’élaboration du document final. Et tout se passe très bien, selon l’archevêque de Kinshasa pour qui, ce synode traite d’un problème qui intéresse aussi l’Afrique car il s’agit de l’Amazonie qui est considérée, avec le Bassin du Congo, comme les deux poumons de l’humanité. Les réflexions des Pères synodaux sont focalisées sur la nécessité de ce qu’on appelle l’écologie intégrale : « Garder cette forêt (de l’Amazonie) pour le bien de l’ensemble de l’humanité, et pour nous, c’est en même temps la responsabilité de garder notre forêt, le bassin du Congo, parce que l’Amazonie et le bassin du Congo sont les deux poumons de l’humanité », a-t-il affirmé.

Similitudes entre l’Amazonie et le Bassin du Congo

Du point de vue écologique, a affirmé le Cardinal Ambongo, il y a des similitudes parce que ce sont les intérêts de grandes compagnies minières, forestières et pétrolières qui veulent détruire ces patrimoines de l’humanité pour des intérêts égoïstes. Et cette réalité est valable aussi bien pour l’Amazonie que pour le Bassin du Congo.

« Sur le plan pastoral, il y a une nuance. Dans l’Amazonie, il y a des peuples qui y vivent et ils sont nombreux. Par contre dans le Bassin du Congo, les peuples qu’on pourrait considérer comme autochtones, ce sont les pygmées. Mais le problème en République démocratique du Congo ne se pose pas seulement par rapport à ce peuple autochtone. C’est sur tout le peuple Bantou qui vit et se développe à partir de la forêt », a soutenu l’archevêque de Kinshasa. Il a en outre estimé que le problème qui se pose aujourd’hui, c‘est de chercher comment trouver un équilibre entre le développement légitime de ce peuple qui habite à côté de la forêt ou dans la forêt et la nécessité et l’urgence de préserver l’environnement. « C’est un équilibre qu’il faut absolument trouver chez nous », pense le Cardinal Ambongo.

Eveiller la conscience de l’humanité et apporter l’évangile

Faisant allusion à son intervention pendant ce synode, le Cardinal Ambongo a indiqué qu’il était nécessaire et urgent d’éveiller la conscience de l’humanité sur la nécessité de préserver « notre Maison commune », comme aime à le dire le Pape François. « Nous ne pouvons pas laisser quelques individus pour des intérêts égoïstes, scier l’arbre sur lequel l’humanité est assise. Si on détruit l’Amazonie, et le Bassin du Congo, c’est l’humanité qui est détruite. Nous ne pouvons pas nous permettre cela », a déclaré le cardinal congolais avant de passer au deuxième point focal de son intervention : la dimension pastorale. « Nos confrères de l’Amérique insistaient beaucoup sur des choses que nous, en République démocratique du Congo et en Afrique en général, considérons comme déjà résolues. C’est-à-dire comment donner des responsabilités à des laïcs dans des zones où il n’y a pas de prêtres ».

En Afrique, confrontés au manque de prêtres, a soutenu le Cardinal Ambongo, nous avions appris depuis très longtemps à confier des responsabilités à des laïcs. « Nous formons des laïcs pour le service d’Eglise. Et l’Eglise d’Afrique est essentiellement portée par des laïcs ».

Etre Père synodal pour la première fois en tant que Cardinal

A la question de savoir si le fait de participer au Synode comme Cardinal changeait quelque chose, l’archevêque métropolitain de Kinshasa soutient qu’ effectivement cela change quelque chose. « Au Synode, il y a de fois certaines concertations qui se font entre les cardinaux. Cela veut dire que tout en étant père synodal, j’ai aussi cette nouvelle conscience de la responsabilité de l’Eglise universelle qui pèse sur mes épaules comme cardinal. Mes interventions ne peuvent plus se limiter à une zone géographique de l’Eglise mais je dois voir l’Eglise dans sa globalité, dans son universalité. Et là je crois que c’est une nouveauté ».

Le souvenir du consistoire avant le Synode

« Je crois que tout le monde avait vu le nombre de délégués venus de mon pays dans sa diversité pour assister au consistoire pendant lequel j’ai été créé cardinal. C’était un événement qui m’a beaucoup ému. La délégation qui est venue du pays a été conduite par le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi lui-même. Ce qui est un grand honneur pour moi et pour lequel je le remercie ». Le Cardinal Ambongo se rappelle ainsi le 5 octobre 2019, un jour avant l’ouverture des travaux de l’Assemblée Spéciale du Synode des Évêques pour l’Amazonie. Ils étaient en effet nombreux, ses compatriotes présents à Rome pour voir leur pasteur revêtir la barrette cardinalice : la présidente de l’Assemblée nationale, des ministres, des députés, des sénateurs, des gouverneurs, de hauts magistrats, des représentants des divers partis de l’opposition, des évêques, des prêtres, des religieux, des laïcs, etc. « Cela traduit le grand intérêt de ma création comme cardinal pour le gouvernement congolais. Ma création en tant que cardinal a rassemblé toutes les entités politiques de mon pays et cela doit continuer », a-t-il fait remarquer. Pour lui, c’est un message. « Un message, pour dire que le peuple attend de l’Eglise, et de moi en particulier, comme nouveau cardinal un rôle que jusque-là peut-être, je n’ai pas joué. Je pense que cette responsabilité rentre dans la droite ligne de ma devise épiscopale : ‘Omnia Omnibus’, ‘Tout à tous’. Je crois que la ligne pastorale qui doit marquer mon épiscopat à Kinshasa est désormais mon travail comme cardinal de la sainte Eglise catholique : rassembler le peuple de Dieu qui est en République démocratique du Congo ». Le successeur du Cardinal Monsengwo dans le gouvernement pastoral de Kinshasa voit donc son nouveau rôle essentiellement comme le pasteur qui rassemble les brebis de Dieu, les brebis dispersées, quelles que soient leurs orientations politiques, leurs conditions sociales et économiques, quel que soit leur niveau intellectuel, sans oublier, comme insiste le Pape, ceux qui sont à la périphérie, c’est-à-dire, les petits qui souffrent beaucoup en République démocratique du Congo.

Dimension œcuménique et dialogue interreligieux

Pour le Cardinal Ambongo, la devise ‘Omnia Omnibus’, est valable aussi bien sur le plan politique que sur le plan religieux. « Je dois aussi rassembler les autres religions et les autres confessions chrétiennes », a-t-il déclaré. « Au consistoire de mon cardinalat il y avait le président de l’Eglise du Christ au Congo, le représentant des musulmans, ainsi que les représentants d’autres confessions religieuses », a-t-il conclu.

Source : www.vaticannews.va